L'addiction au sexe est aujourd'hui mieux reconnue.
L'OMS (organisation mondiale de la santé) reconnaît désormais "les comportements sexuels compulsifs" comme un "désordre mental", sans pour autant parler "d'addiction". . Ces troubles sont "caractérisés par une perte de contrôle intense à résister à des impulsions ou à des besoins sexuels répétitifs, générant du stress et des déficiences". Elle fait partie des addictions dites sans substance, comme le jeu.
Comment pose-t-on le diagnostic ?
Un nouveau diagnostic, le trouble hypersexualité, est proposé pour la cinquième édition du Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM-5).
Ce trouble est proposé dans la catégorie Troubles sexuels et d'identité de genre. Les critères diagnostiques proposés pour ce trouble sont les suivants :
A. Fantasmes, pulsions sexuelles et comportements sexuels récurrents et intenses, pendant une période d'au moins six mois, en association avec 4 ou plus des 5 critères suivants:
1. Un temps excessif est pris par les fantasmes et pulsions sexuelles, et par la planification et l'accomplissement d'une activité sexuelle.
2. Se livrer répétitivement à des fantasmes, pulsions et comportements sexuels en réponse à des états d'humeur dysphorique (ex. anxiété, dépression, ennui, irritabilité).
3. Se livrer répétitivement à des fantasmes, pulsions et comportements sexuels en réponse à des évènements stressants de la vie.
4. Efforts répétés mais infructueux pour contrôler ou réduire de façon significative ces fantasmes, pulsions et comportements sexuels.
5. S'adonner répétitivement à une activité sexuelle en ne tenant pas compte du risque de préjudice physique ou affectif pour soi ou autrui.
B. Présence d'une détresse personnelle significative ou d'une altération dans les domaines sociaux, occupationnels ou autres domaines importants du fonctionnement associées avec la fréquence et
l'intensité de ces fantasmes, pulsions et comportements sexuels.
C. Ces fantasmes, pulsions et comportements sexuels ne sont pas dus aux effets physiologiques directs d'un substance exogène (ex. une drogue prêtant à abus ou un médicament).
D. La personne a au moins 18 ans.
Le trouble hypersexualité se distingue des troubles paraphiliques. Les papaphilies sont caractérisées par une excitation sexuelle persistante socialement anormale ou déviante (ex.
exhibitionnisme, fétichisme, tranvestisme, voyeurisme, zoophilie, pédophilie) alors que le trouble hypersexualité est représenté par des comportements sexuels normaux qui sont répétitifs,
excessifs ou désinhibés (ex. comportements sexuels entre adultes consentants, pornographie, cybersexe). Les deux diagnostics peuvent toutefois être concomitants. Dans tous les cas cependant
le trouble d'hypersexualité inclut par définition un comportement sexuel persistant et répétitif qui n'est pas inhéremment paraphilique.
Le dépendant au sexe n'est pas forcément une personne à la vie sexuelle intense. C'est une personne qui ne parvient pas à arrêter ces pratiques alors qu'elle le souhaite et cette compulsion détruit sa vie professionnelle, affective… Il ne s'agit pas de la femme ou du mari qui a trompé son conjoint par exemple et qui se sent très coupable et s'imagine malade.
Comment soigne-t-on une addiction au sexe ?
La base du traitement est la psychothérapie, avec une dimension comportementale dans un premier temps afin de trouver les déclencheurs des pulsions et réfléchir à la manière de les faire cesser. Puis il faut comprendre pourquoi la sexualité est surinvestie et si l'addiction masque une dépression. Cela peut prendre plusieurs mois comme plusieurs années. Mais en parler, c'est déjà commencer à sortir de la spirale addictive et à briser la solitude, un facteur dépressogène. Cette première étape est essentielle. Il ne s'agit pas de faire du sevrage. Lors de ce travail, les patients doivent réapprendre à prendre du plaisir dans d'autres activités, à voir l'autre comme une personne et non comme un objet pour retrouver le sens du désir vrai.
Groupes de paroles, traitements médicamenteux : les autres formes de prise en charge ?
Il existe un groupe d'entraide sur le modèle des alcooliques anonymes : les Dasa (dépendants affectifs et sexuels anonymes), qui appliquent un programme en douze étapes pour le maintien de l'abstinence. Ce mouvement, d'origine protestante, est né en 1935. Il n'implique ni argent ni relation de pouvoir et n'entre pas en concurrence avec la psychothérapie. Ce type de groupe peut aider les patients à se sentir moins seuls.
Par ailleurs, il n'y a pas de traitement chimique spécifique pour l'addiction sexuelle, mais les antidépresseurs peuvent être indiqués car elle est souvent associée à une dépression. Les médicaments peuvent aussi aider à éliminer les pensées obsédantes, répétitives.
Dépendance au cybersexe
Addicts au sentiment amoureux ou à l’acte sexuel, les comportements sont très variés.
L’addiction au sexe est une activité qui dérape et échappe au contrôle du sujet. Par exemple, la masturbation compulsive, jusqu’à quinze fois par jour, avec le risque de blesser ses organes sexuels, et celui de ne pas pouvoir se retenir de pratiquer alors que l’on est dans un endroit public.
L’addiction sexuelle est d’autant plus problématique qu’elle s’accompagne souvent d’autres dépendances, le jeu, l’alcool, le tabac, les drogues comme la cocaïne, qui accroissent les sensations de plaisir.
Internet est un nouvel espace pour les addictions sexuelles. Consommation effrénée de pornographie en ligne, nuits et jours. Le cybersexe concernerait près de 10 % des hommes internautes. Aucun médicament n’arrive actuellement à venir à bout des comportements sexuels compulsifs, que se soit les antidépresseurs ou les antiandrogènes, réservés aux seuls délinquants sexuels. Et si les thérapies comportementales et cognitives obtiennent des résultats, elles ne soignent pas "la vulnérabilité profonde des patients". La thérapie peut amener les patients à conscientiser leurs actes et leurs pulsions et à accepter de modifier leur comportement.
C’est cette dépendance aux images des écrans qui, paradoxalement, pousse pas mal d’adeptes du e-porno à demander de l’aide.
Voici un outil qui pourra vous aider à mieux percevoir où vous en êtes...
l’outil
PEACCE*, qui propose de répondre aux questions suivantes (adaptation en langue française par Laurent Karila) :
1. Trouvez-vous que vous êtes souvent préoccupé
par des pensées sexuelles? (Pensées)
2. Cachez-vous certains de vos comportements
sexuels à votre entourage (partenaire de vie, famille, ami(e)s proches...)? (Entourage)
3. Avez-vous déjà recherché de l'aide pour un
comportement sexuel que nous n'appréciez pas de faire? (Aide)
4. Est-ce que quelqu'un a déjà été heurté
émotionnellement à cause de votre comportement sexuel? (Conséquences)
5. Vous sentez-vous contrôlé par votre désir
sexuel? (Contrôle)
6. Vous sentez-vous triste après être passé à
l'acte sexuellement (rapports sexuels, internet, autres)? (Emotions)